Giovanni, un italien en Afrique avec l’Ong LVIA

Giovanni fait route avec l’Ong italienne LVIA depuis maintenant 5 ans. Au départ : une attirance pour l’Afrique, pour ses ambiances, pour ses nécessités aussi.


Après avoir roulé sa bosse en Guinée Bissau et au Burkina Faso, le voici au Sénégal pour continuer son action en matière d’aide au développement. Un itinéraire qui s’apparente à un parcours de coeur puisqu’il vient d’épouser une guinéenne !


Après avoir soutenu une thèse en géologie, j’avais eu envie de travailler en Afrique. Je n’avais pas les idées très claires. Je voulais quitter la Suisse et rentrer en Italie. J’ai suivi un cours intensif avec la Croix rouge international destinés aux futurs géologues coopérants africains. L’Afrique m’attirait par son ambiance. Je suis ensuite parti avec LVIA. Et effectivement l’atmosphère me plaît ici. Avant d’arriver au Sénégal en janvier 2004, je suis resté trois ans et demi en Guinée Bissau et 6 mois au Burkina Faso.


L’Association Internationale de Volontaires Laïques (LVIA - en anglais Lay Volonteer International Association) est une des plus anciennes Ong italienne. Nous nous situons plutôt dans les catégories d’Ong moyennes et nous avons des projets dans une dizaine de pays africains : de mémoire au Sénégal, Mali, bientôt Mauritanie, Burkina Faso, Ethiopie, Kenya, Tanzanie, Burundi. Notre objectif est de contribuer au développement et à l’amélioration des conditions de vie des plus défavorisés.

Côté italien, LVIA a un rôle d’assistant technique avec la région lombarde et les départements italiens : nous leur fournissons un appui dans leur politique de coopération décentralisée. Plus généralement, nous intervenons en formation, en appui et en médiation sur le territoire italien.

Côté africain, la plus grande partie de nos projets touche le milieu rural en particulier l’agriculture, l’élevage et les équipements hydrauliques (pompes éoliennes, puits, forages). Nous sommes passés des dispensaires et des pompes éoliennes à des choses progressivement plus évoluées. En milieu urbain, nous contribuons à valoriser les déchets plastiques en les recyclant. Nous avons implanté un centre à Thiès qui achète les déchets plastiques, effectue un travail de pré-traitement et les commercialise dans les industries de Dakar. C’est une coopérative de femmes qui s’occupe de tout cela. Des points de récupération des plastiques sont ouverts en ville ce qui nous permet en même temps de sensibiliser la population sur la santé, l’hygiène et la propreté. Nous avons commencé avec ce projet pilote, puis un autre centre a été ouvert à Kaolack. Le gouvernement italien finance ce projet sur 4 ans. Nous voudrions maintenant faire évoluer ces centres vers des unités de production.

Nous fonctionnons par « cycle de projet » : lorsqu’une opération s’achève, nous préparons nos prochains programmes en réfléchissant sur notre expérience et en faisant un diagnostic sur le terrain. Nous sommes en mesure de bâtir le projet avec une équipe de quatre personnes (le référent du pays, le responsable des politiques globales de l’ONG, le coordinateur local et le chef de projet).
Les projets sont ensuite présentés à l’Union européenne. Nos bailleurs publiques sont la Banque mondiale, les régions lombarde et piémontaise en Italie, le Ministère italien des Affaires étrangères. Chez les privés : des fondations bancaires et le capital de LVIA. Il y a 70% de fonds publics. Nous sommes en consortium avec l’Ong française « Eaux vives » par exemple sur un projet spécifique à Tambacounda. Au Mali, on est avec 6 Ong réunies autour d’une thématique (sanitaire, environnement).


D’après toi, les politiques de LVIA te paraissent vraiment reliées aux réalités du terrain ?

Oui, il me semble que la définition des politiques se fait en relation avec les coordinateurs sur le terrain. Je crois que l’on est pertinent sur les choix des politiques. Le siège en Italie fixe les orientations générales mais le contenu des projets est surtout élaboré par les coordinateurs de manière décentralisée. Après il y a d’autres logiques : les sommes allouées par le Ministère italien dépendent bien sûr des échanges commerciaux et des relations diplomatiques avec le Sénégal.


Comment travaillez-vous avec les acteurs sénégalais ?

Nous avons des protocoles d’accord avec le Ministère de l’Intérieur ou de la Coopération du pays. Le ministère donne son approbation et oriente potentiellement les projets. Localement, les partenaires peuvent être les municipalités, les agents techniques, les coopératives, les organisations paysannes. Nous faisons de plus en plus attention à la qualité des partenariats, au partage des responsabilités.

Nous sommes à Thiès depuis trente ans. On est passé progressivement des dispensaires, aux pompes éoliennes puis aux groupements et aux coopératives. Une de nos règles est qu’une fois nos projets terminés, il faut que les capacités restent en place. Nous sommes attachés à cela et je crois que ça marche pas mal. Nous nous efforçons de ne pas penser tout seul les projets en y insérant les acteurs.

C’est justement ton rôle ?

Oui, je passe beaucoup de temps à consulter les habitants et les acteurs. Je participe à l’écriture des projets et je fais le lien entre le siège situé en Italie et les coordinateurs locaux qui sont sur place.

Je viens de sortir d’une réunion avec trois autres ONG. La question que nous nous sommes posée, c’est comment faire en sorte que l’argent envoyé par les émigrés en Europe profitent aux familles mais plus largement aux autres et à des projets locaux. On pourrait imaginer que les flux d’argent et que les investissements des émigrés rentrés au pays soient en partie mutualisés. Il faut savoir qu’il y a des réseaux spécifiques qui facilitent l’émigration. Ces réseaux sont capables de prêter de l’argent pour faciliter le départ des émigrés, mais cela profite souvent aux mêmes. Et il y a beaucoup de transferts d’argent du nord vers le sud.


Quelle est votre lien avec la plate-forme des Ong européennes au Sénégal ?

Nous présidons actuellement la plate-forme. Cette coordination d’Ong s’est constituée pour organiser la concertation avec l’Union Européenne et questionner ses politiques. Auparavant, les Ong répondaient individuellement aux appels à projet. La plate-forme permet à présent d’améliorer la compréhension des appels à projet et de mettre en cohérence les différentes propositions. Les 25 Ong membres (dont 10 italiennes) mettre en commun leur information et forment des consortiums ou des sous-réseaux en fonction des projets.


Comment se présente la suite pour toi ?

Et bien je suis marié avec une guinéenne, nous avons eu un enfant. Maintenant que nous habitons au Sénégal, j’ai envie de rester ici. Vous comprenez pourquoi ! Je suis encore ici pour 3 ans. J’aimerais continuer dans le monde des ONG et de la coopération.


Quelques compléments :
- Les défis des ONG face à la crise des régulations publiques - note de travail de la fondation Charles Léopold Mayer (format PDF - 200Ko) - télécharger
- Le phénomène Ong - note de travail de la fondation Charles Léopold Mayer (format PDF - 124Ko) - télécharger
- Les alternatives à l’émigration : Les apports des migrants mahgrébins restent irremplaçables - voir la fiche d’expérience
- ACAI, Association pour le Conseil et l’Aide aux Investissements - insérer les projets des migrants dans la réalité locale - voir la fiche d’expérience
- Création d’une coopérative agricole et d’élevage au Maroc par des immigrés de retour dans leur région d’origine - voir la fiche d’expérience
- Quand l’équipe d’un projet doit passer le relai
Le cas d’un projet de développement de la pêche en Casamance, Sénégal
- voir la fiche d’expérience


Dakar - Sénégal, le 10 mai 2004




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