Moussa Bazié et Fodoba : deux compères engagés pour la jeunesse

Qu’est-ce qui peut bien rassembler Moussa Bazié Koné et Fodoba Doumbia ? L’amitié, tout d’abord et l’engagement ensuite en faveur de la jeunesse malienne. Le soir où nous nous rencontrons, un gros cumulus décida de brader son stock d’eaux pluviales en inondant les rues de Bamako et nous obligea à parler très fort pour nous faire entendre. Un entraînement comme les autres Pour Moussa et Fodoba entraînés à hausser la voix pour porter la parole de leurs confrères.




Moussa Bazié, on se tutoie bien sûr, vous êtes le secrétaire de la coordination des jeunes de la commune III de la ville de Bamako, le commissaire chargé de la solidarité et de l’économie solidaire au niveau du Conseil national de la jeunesse, et le secrétaire général du Club des jeunes pour la solidarité et le progrès . En quoi consiste ces différentes organisations ?

Tu peux répéter, je n’ai pas bien entendu ?

Ok... tu es le secrétaire de la coordination des jeunes de la commune III de Bamako et le commissaire chargé de la solidarité et de l’économie solidaire au niveau du Conseil national de la jeunesse et le secrétaire général du Club des jeunes pour la solidarité et le progrès. En quoi consiste ces différentes organisations ?

Le Conseil national de la jeunesse du Mali est une association apolitique qui est censé être l’interlocuteur des pouvoirs publics sur les questions de jeunesse. Elle a été mise en place par un certain nombre de jeunes du Mali. Des coordinations sont implantées dans chacune des huit régions du Mali, il y en a également au niveau communal (dans les quartiers de Bamako par exemple) et l’ensemble de ces coordinations régionales et communales se retrouvent dans un organe de concertation : le Conseil national de la jeunesse. Une rencontre annuelle rassemble toutes les équipes délocalisées et tous les trois ans, un congrès invite l’ensemble des participants du Conseil national de la jeunesse sous la tutelle du Ministère de la jeunesse et associant les représentants concernés de l’Etat.

Nos objectifs sont de travailler sur l’épanouissement social des jeunes et la défense de leurs intérêts. Nous sommes conduits à monter des projets surtout avec la coordination de jeunes de Bamako III.
Quelques exemples : nous mettons sur pied un cadre de concertation avec la mairie de Bamako pour définir un programme d’activités commun et échanger nos expériences entre « jeunes porteurs de projet ». Ce projet se fait à l’échelle de la commune III de Bamako, nous travaillons pour cela avec les autorités municipales. Dans le domaine sportif, nous voudrions organiser un cross-country le 22 septembre prochain. Nous voudrions étendre la manifestation avec le ministère de la Jeunesse et la fédération d’athlétisme en invitant deux pays africains à participer (le Burkina et le Niger).

Le 16 juin passé a vu se dérouler la journée de l’enfant africain. Nous avons essayé de faire des donations de nourriture et de vêtements à destination du centre de détention des jeunes de Bamako (120 jeunes sont détenus). Nous avons discuté avec ces jeunes détenus et avec la directrice du centre pour en savoir un peu plus sur leur parcours et étudier les possibilités de les aider dans leur l’apprentissage en échangeant des savoirs avec leur pairs qui vivent « à l’air libre » à Bamako. Ces jeunes purgent leur peine mais il faut leur permettre de produire quelque chose d’eux-mêmes, pourquoi pas de l’artisanat. Trente jeunes s’étaient déplacés en présence des ministères de la justice, du développement social et de l’économie solidaire, de la famille et de l’enfance et de l’ambassade de l’Afrique du Sud. Dans la foulée, nous essayons de sensibiliser les prostitués pour les motiver à travailler avec le centre de détention pour les insérer, leur permettre de trouver une activité et de comprendre leur parcours en favorisant le dialogue avec les autres. Cela demande beaucoup d’énergie de mobiliser ces femmes. Nous réfléchissons à l’organisation de quelque chose pour le mois d’octobre qui est ici le mois de la solidarité.



Fodoba, on se tutoie vraiment cette fois-ci, tu es membre actif du Club des jeunes pour la solidarité et le progrès. Quels sont tes chevaux de bataille ?

Au début, quelques jeunes s’étaient dit : « nous qui avons eu la chance de finir nos études, de travailler, comment pouvons-nous participer au changement de la société et apporter aux autres jeunes ? ». Nous voulions créer un centre d’orientation et d’éducation des jeunes, qui puisse les appuyer également dans leur initiatives économiques. Notre philosophie est de guider les autres. Cette idée est encore à l’état de projet aujourd’hui. Dans les premiers temps, nous avons parrainé des enfants de la rue pour les insérer dans l’école en dialoguant avec les familles. C’est très difficile de mettre en oeuvre nos idées car les moyens nous font défaut. Nous avons tous une activité professionnelle et nous sommes tous volontaires pour animer cela. Nous investissons les moyens que nous avons et nous essayons bien sûr de mobiliser d’autres énergies.

Donc le Club des jeunes pour la solidarité et le progrès est né en 1998, et a travaillé au départ avec le Conseil pour l’éducation à la base (CAEB) sur la prévention du SIDA. Depuis, nous avons organisé des matchs de football par exemple car le sport est un très bon moyen de toucher et de mobiliser les jeunes. Pendant la mi-temps, des animateurs font passer des messages sur la prévention de la maladie. Nous avons organisé des conférences-débat dans les écoles. Nous avons senti qu’il y avait un déficit de communication sur ce sujet renforcé par le fait que la discussion sur la sexualité est taboue. Faire communiquer les jeunes entre eux est un bon moyen ici pour faire changer les idées et les mentalités.
Nous animons des réunions et nous faisons des compte-rendus de réunion. Nos interlocuteurs sont les techniciens municipaux, les associations et les Ong. Nous avons souhaité être autonome et nous ne travaillons pas avec l’Etat contrairement au Conseil national.


Moussa Bazié, penses-tu un jour t’investir dans la politique et être un jour candidat au présidentielles ?
Ah ah !! Bon ! Je n’y pense pas encore mais vous pouvez m’appeler président histoire de rêver un peu...

J’en reviens à nos affaires de jeunesse. Le problème fondamental des jeunes ici, c’est le chômage. Ils voient les différences de richesse : certains ont beaucoup et d’autres rien. Ils voient des adultes qui sont dans les bureaux et qui ne sont pas productifs. Il y a une société injuste et cruelle. L’autre fléau, c’est la drogue et l’alcool. Je crois qu’il y a une volonté de faire changer les choses même au niveau politique. Il y a émergence des groupements et associations de jeunes qui n’attendent pas l’aide de l’Etat mais elles sont dépendantes inévitablement des moyens alloués. Vous savez, on dompte facilement les détracteurs en maintenant une dépendance financière ou politique.

La coordination de la commune III regroupe toutes les organisations locales de jeunesse. Le Club des jeunes pour la solidarité et le progrès est donc membre de la coordination de la commune III. J’y retrouve par conséquent mon cher confrère Doumbia ! Nous nous efforçons de regrouper les acteurs travaillant avec la jeunesse de la commune et de formuler un projet et une parole commune. Lors de notre assemblée générale, nous pouvons compter plus d’une centaine de participants. La police vient pour empêcher de nous taper dessus parfois !! On se bagarre d’abord, puis après on discute ! Et les générations se mélangent ! Il y a même une personne âgée de cent ans qui a proposé des actions pour la coordination.


Que vous manque-t-il pour concrétiser vos projets ?

Des outils d’échange d’expériences, des énergies et des idées, des réseaux et des moyens. Nous sommes membres du collège jeune du réseau gouvernance Afrique (lien FRAO, Sidiki, Ousmane Balde). Je suis preneur de votre idée de participer à l’opération Tambours de la paix (http://www.drumsforpeace.org) . &lt..., Sidiki Abdul Daff, Ousmane Balde, tous les portraits et rêves indexés avec le mot-clé "jeune"
- le cahier de propositions du chantier jeunes de l’Alliance pour un monde responsable pluriel et solidaire (format PDF - 190 Ko) -> télécharger




Bamako - Mali, le 17 juillet 2004







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